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Extrait 1   |   Extrait 2

p. 111 à 112


Coline mit du temps à prendre chair, à exister entre eux autrement qu'en étant la disparue. Il leur fallut plusieurs rencontres, des conversations à bâtons rompus qui amenaient peu à peu une confiance réciproque : un abandon total qui fut facilité par le tutoiement, très vite adopté. Des anecdotes, tous les deux en avaient à revendre. Pour Gilles, sa sour représentait un idéal inaccessible : la beauté, le talent, la fougue, des aspirations qu'il respectait sans les comprendre. Pour Anaïs, son amie de toujours avait sa part d'ombre et de mystère.

- Quand je les ai surpris enlacés, mon père et elle, Coline n'a eu aucune réaction. Le lendemain, elle était partie, sans même me dire au revoir.

Elle ajouta :

- Ou plutôt adieu.

Était-ce par gêne envers son père qu'elle avait omis de raconter la vérité tout entière dans sa crudité, la confrontation avec son père, la dispute, les mots qu'elle lui avait jetés à la tête, tu l'as baisée, c'était bien ?, l'interminable silence entre eux après qu'elle fut sortie comme une furie de la grande bâtisse en criant qu'elle n'y remettrait plus jamais les pieds ? Tant d'efforts pour oublier ces moments pénibles, et les voilà qui remontaient à la surface, tout cela parce qu'un homme, Gilles, lui accordait sa confiance.

Lui l'observait. Depuis les trois derniers rendez-vous, il la percevait d'une autre manière, plus du tout comme une femme un peu distante, même intimidante. Elle dégageait un charme certain, se dit-il presque honteux de se l'avouer, avec ses cheveux châtains attachés à la hâte, ses yeux marron, son expression nostalgique quand elle laissait errer son regard sur les clients attablés et le comptoir derrière lequel s'affairait une serveuse.




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